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Sécheresse : les refuges de montagne préparent l’avenir

La FFCAM repense les réhabilitations


Alors que les sécheresses s’imposent de plus en plus, les refuges de montagnes cherchent des solutions pour continuer de s’alimenter en eau – et éviter les fermetures.


Rédigé par le Jeudi 27 Juillet 2023

Au coeur du Parc National des Pyrénées et en zone Natura 2000, le refuge de montagne d'arremoulit est en pleine réhabilitation - DR : IVAN OLIVIER PHOTOGRAPHIES - COLLECTION FFCAM
Au coeur du Parc National des Pyrénées et en zone Natura 2000, le refuge de montagne d'arremoulit est en pleine réhabilitation - DR : IVAN OLIVIER PHOTOGRAPHIES - COLLECTION FFCAM
Sécheresses, canicules, épisodes climatiques extrêmes… L’été 2023, avertit la communauté scientifique, va devenir une norme.

Un constat qui n’est pas sans conséquence, notamment en haute montagne et dans les refuges de montagne où la gestion de l’eau est de plus en plus un problème.

« Isolés par nature, les refuges de montagne sont des lieux où les randonneurs, à pied ou à skis, et les alpinistes peuvent se reposer et se réfugier 365 jours par an » explique la Fédération française des clubs alpins de montagne (FFCAM), qui ajoute :

« Ils sont dépendants des ressources locales disponibles autour du bâtiment pour leur approvisionnement en eau et en énergie et sont donc particulièrement vulnérables en cas de pénurie d'eau ».

Même si chaque refuge dépend d’un environnement bien particulier, ils font tous face aux mêmes problèmes : la fonte des glaciers et le manque de neige sont autant d’eaux en moins pour nourrir les cours d’eau, et la sécheresse empêche les nappes phréatiques de se remplir.

Si l’on en croit les chiffres du Parc National de la Vanoise, la température moyenne annuelle dans les Alpes a augmenté de +2°C en hiver depuis 1970 et de +1,5°C en été.

Conséquences : moins d’eau pour le gardiennage, les guides et les randonneurs dans les refuges (pour boire, se restaurer, pour l’hygiène et les sanitaires) et parfois des risques d’éboulement.

Refuges de montagne : un été 2022 particulièrement sec

« L'année dernière fut marquée par une situation particulièrement tendue, notamment dans les massifs alpins, suite à la concomitance d'un faible enneigement hivernal, d'un printemps très doux et d'une sécheresse estivale prolongée » indique la FFCAM.

« Ça n’a pas été l’hécatombe non plus, mais il y a eu des difficultés » relativise Maria-Isabel Le Meur, directrice adjointe de la FFCAM, citant le refuge du Col du Palet en Vanoise, qui a dû se résoudre à fermer dès la mi-juillet.

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Le Parc national indiquait alors : « les trois sources d’approvisionnement en eau potable se sont taries au cours du week-end dernier (mi-juillet 2022 ndlr). La gardienne et le Parc national, après avoir étudié différentes solutions, ont dû se résigner à interrompre le gardiennage lundi 18 juillet ».

Pour Maria-Isabel Le Meur, cet été 2022 fut particulier, et l’été 2023 est heureusement bien plus supportable, avec un hiver neigeux, des précipitations et des températures basses au printemps.

« Il y a deux territoires complexes : le refuge des Cortalets dans le massif du Canigou dans les Pyrénées-Orientales, qui souffrent énormément du manque de précipitations, et le chalet de la Maline qui est très dépendant d’une source dans le Verdon et se retrouve dans une situation précaire. Mais à part ces deux cas, la situation est très différente cette année.

Ça n’est pas linéaire, mais il faut se préparer. On sait que, sur le long terme, il y aura de moins en moins de précipitations neigeuses pour les réserves d’eau. 2022 a été dur, 2023 ça va bien, mais on ne sait pas ce que seront les prochaines années, alors on prévoit ».

Réduire les douches : « un choix fort, mais qu’on ne fait pas seul »

Pour faire évoluer les refuges, la FFCAM a commencé à mettre en place des solutions presque sur mesure.

C’est un travail de fourmi pour la fédération, car la situation hydrique est extrêmement locale, avec des besoins différents selon l’emplacement et des possibilités différentes aussi en fonction de la topologie du territoire.

Installer des réserves d’eau, par exemple, peut-être parfois une solution. Pour peu qu’on ait la place pour plusieurs dizaines de mètres cubes et que l’eau ne gèle pas.

La récupération des eaux de pluie aussi est mise en place, mais pas toujours utile, car la réglementation est stricte et que l’usage doit peu ou prou se cantonner aux toilettes. Or, la FFCAM souhaite déployer de plus en plus de toilettes sèches.

« C’est du cas par cas, résume Maria-Isabel Le Meur. Ça dépend aussi du passage des randonneurs : s’il y a de l’itinérance, par exemple, on aura besoin de mettre plus de douches pour éviter que les gens ne se lavent dans les cours d’eau et les polluent ».

Les douches sont, pour elle, un des principaux leviers « Sur les refuges sans itinérance où on ne reste pas, la douche n’est pas nécessaire, on peut se contenter d’une toilette de chat. C’est un choix fort, mais qu’on ne fait pas seul ».
Le refuge d'arremoulit est situé au bord du lac de montagne d'Arrémoulit - DR : IVAN OLIVIER PHOTOGRAPHIES - COLLECTION FFCAM
Le refuge d'arremoulit est situé au bord du lac de montagne d'Arrémoulit - DR : IVAN OLIVIER PHOTOGRAPHIES - COLLECTION FFCAM

Pour chaque réhabilitation de refuge, la FFCAM s’appuie sur l’intelligence collective.

Les usagers, les institutions, les parcs, les guides, les gardiens... Définissent ensemble un cahier des charges. Et s’il y a des demandes fortes en matière de confort dans certains refuges, ça n’est pas toujours le cas.

Pour la directrice de la fédération, dans un refuge, « on ne se douche pas comme en vallée et c’est bien compris, on n’est pas dans l’hôtellerie. Il y a 2, 3, 4 douches pour 100 personnes, avec un débit réglé, minutée sur 2 à 3 minutes, parfois payantes... »

Tout comme le confort thermique, la gestion de l’eau est une manière de valoriser un tourisme sur 4 saisons : « Grâce aux efforts sur ces deux points lors de la rénovation, il y aura un gardiennage 7 mois sur 12 au refuge de la Pointe Percée, ce qui permet notamment l’accueil de scolaire et c’est essentiel pour nous ».

Trois ans de travaux, un bâtiment flambant neuf et un exemple d’usage en fonction des contraintes, dans un territoire où l’eau s’infiltre très vite et ne reste pas en surface, pour valoriser un tourisme de montagne sur l’année et un public plus large.

Sensibiliser les randonneurs néophytes

Car le tourisme en montagne prend de l’ampleur. « On voit se développer un public néophyte depuis la crise covid » indique Maria-Isabel Le Meur.

Un nouveau public qu’il importe de sensibiliser et à l’écoute duquel il faut être.

« Nous avons vocation à rendre la montagne accessible à tous ; le refuge est notre principal levier. Une nuitée en refuge, c'est 20 € maximum et nous tenons à ce que ça reste une priorité. Mais devant l’augmentation des coûts, on a décidé de revenir aux basiques : la fonction première d’un refuge, c’est d’abriter, gardé ou non.

Et quand il est gardé, de mettre en place des moments de convivialité autour de deux enjeux : le milieu naturel et la vie dans le bâtiment ».


Pour ça, la FFCAM a mis en place plusieurs outils lui permettant de sensibiliser les randonneurs et ajuster leurs pratiques.

Via de la communication écrite ou des moments de dialogue avec les gardiens, la fédération souhaite expliquer aux personnes de passage l’usage de l’eau en refuge, qui n’est pas le même que dans la vie quotidienne.

« On donne des indicateurs. Par exemple, chaque jour, on utilise environ 150 litres d’eau ; en refuge avec une toilette de chat ça passe à 20. On va aussi expliquer qu’il n’y a pas de raccordement comme en vallée.

C’est un gros travail, mais globalement il y a une bonne compréhension »
se félicite Maria-Isabel Le Meur.

Des refuges phares pour l'environnement

Pour faciliter l’accès à ces connaissances, la FFCAM, avec les clubs alpins, parcs naturels, refuges sentinelles et le réseau Nature Science et Environnement ont créé le projet « Refuges, phare pour l'environnement ».

S'appuyer sur des éléments ludiques, et « proposer aux randonneurs, aux montagnards et aux scolaires des animations autour des refuges afin de mettre en place des actions de sensibilisation » indique le site de la fédération.

Récemment, elle a imaginé un jeu pour les scolaires, les familles, mais aussi un peu pour tout le monde :

Un carnet d'accueil avec des questions / réponses à la manière d'un cahier de vacances ;

Un jeu de piste permet de comprendre le milieu naturel dans lequel est situé le refuge, et comment se comporter pour réduire sa consommation quand on est dans un bâtiment en milieu isolé.

Testé au refuge de la Pointe Percée et dans quelques autres dans les Pyrénées et les Alpes, le jeu devrait se développer un peu partout, au gré des réhabilitations, et faire du parc entier un phare pour l'environnement.

Juliette Pic Publié par Juliette Pic Spécialiste rubrique Voyages Responsables - TourMaG.com
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